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Moniteur : le diplôme BEPECASER en mal de reconnaissance


Thierry et Philippe sont deux enseignants de la conduite et gérants d’une auto-école dans la banlieue parisienne. L’un a repris son auto-école il y a 5 ans, tandis que l’autre co-gère une auto-école familiale depuis un peu plus d’un an.
Pour Permis Pratique, ils ont accepté de témoigner de façon anonyme sur leur diplôme, le BEPECASER, et de parler de trois inconvénients qui jettent selon eux le discrédit sur leur métier d'enseignant.



1 - Un diplôme sous-estimé dont les réelles compétences mériteraient d’être mieux valorisées

Selon Thierry, de plus en plus de postulants au diplôme du BEPECASER en recherche d’emploi depuis un certain temps voient en ce diplôme une « roue de secours ». D’après Thierry, Pôle emploi financerait allègrement les formations de demandeurs d’emploi au BEPECASER, ce qui profiterait également aux centres de formation de moniteurs. D’où son constat : « on forme n’importe qui en tant que moniteur aujourd’hui », sous-entendu, même des gens qui n'ont que faire d'enseigner la conduite et qui le font juste pour se caser. Or, enseignant en conduite est un métier qui s’apprend sérieusement, qui est loin d'être facile, et qui nécessite un minimum de motivation. Et beaucoup de personnes sous-estimeraient les compétences et les qualités humaines nécessaires pour exercer correctement le métier.

2 - Une formation pas toujours à la hauteur

Toujours selon Thierry, « la pédagogie est très mal enseignée lors de la formation au BEPECASER », avec entre autres un manque de formateurs de moniteurs (appelés BAFM, en référence au Brevet d’Aptitude à la Formation de Moniteurs).
Quant au jury du diplôme, il ne serait pas toujours bien placé pour juger la pédagogie du candidat à l’enseignement. Pourtant, « les critères du diplôme sont bien faits, mais pour la mise en application, c’est autre chose », estime Thierry. « Le jury du BEPECASER est souvent composé de gendarmes et d’inspecteurs du permis. Or, ces deux corps de métiers ne sont pas des formateurs. »  Si vous ajoutez au fait que la pédagogie n’est pas toujours bien enseignée chez un enseignant de la conduite, et qu’un manque de pédagogie n’est pas forcément sanctionné pour l’obtention du diplôme, devinez ce qui peut bien se passer lorsqu’une personne veut devenir moniteur parce qu’il n’a trouvé que ça et n’a aucunement la vocation ? C’est ce qui fait la différence entre un « moniteur » et un « formateur », conclut Thierry.
 
Dans son auto-école à dimension humaine (2 enseignants et une secrétaire), il a d’ailleurs toutes les peines du monde à recruter un nouvel enseignant digne de ce nom, c'est-à-dire pédagogue, psychologue, humble, et qui applique avec l’élève les étapes de conduite comme il se doit. L’enseignant doit être capable de s’adapter au cas de chaque élève, car « à chaque problème existe sa solution ». Une affirmation qui illustre à merveille la psychologie dont fait preuve Thierry : « ici, il n’existe pas d’élèves mauvais, mais des élèves en difficulté ». « Il me faut un formateur, un enseignant en conduite, pas un moniteur, on ne part pas au ski », insiste Thierry. De fait, il a déjà dû se séparer récemment d’un « moniteur » à l’essai, dont la façon d’enseigner semblait approximative, et les fiches de suivi d’élèves brouillons et incompréhensibles. Car comment savoir alors où en est réellement l’élève et quelles sont ses points faibles avec un suivi bâclé ou inexistant ? Certains moniteurs, m’explique Thierry, font l’impasse pendant les heures de conduite sur la recherche d’indice et la conduite commentée par l’élève, ce qui est pourtant le B.A.-BA de la conduite.

3 - L’usage du terme « moniteur de conduite » pour les diplômés du BEPECASER

Ce n’est peut-être qu’une question de vocabulaire diront certains, mais pour beaucoup, le « moniteur » évoque plus le cliché du moniteur de type colonies de vacances ou Club Med au teint hâlé et aux cheveux gominés qui fleure bon le farniente. De quoi faire perdre d’emblée toute crédibilité. Là-dessus, Thierry et Philippe ne cachent pas leur indignation car cet usage est devenu un véritable abus de langage : « nous sommes des enseignants en conduite, des formateurs, pas des moniteurs ! ».


Nina Belile est l'auteure de ce sujet, ainsi que du livre Permis de galérer.

Le passage du permis B (auto), elle le connaît mieux que quiconque pour l'avoir obtenu en 2011 à l'âge de 30 ans, après un très long chemin semé d’embûches en tous genres.

Dix moniteurs différents, pas moins 118 heures de conduite, 6 000 € et la réussite en tant que candidat libre, au total son permis de conduire lui est revenu en termes de temps au passage d'un BTS (2 ans).

Si elle dénonce les failles du système d'apprentissage de la conduite en France dans son ouvrage, Nina Belile a également la volonté de faire partager sa longue expérience et ses conseils aux autres candidats dans les colonnes de Permis Pratique comme journaliste.


Retrouvez aussi Nina Belile sur le site web dédié à son livre : Permis de galérer

Dimanche 6 Avril 2014



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